Par Philippe Baumard, Professeur à l’université d’Aix Marseille

Mardi 25 mars 2014
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Affolement des marchés, des médias, des responsables politiques, réactions aveugles, emballements des dettes souveraines, spéculations financières, révolte des peuples et répressions : et si la succession des crises et des impasses où elles semblent nous conduire résultaient d’un vide stratégique ? Situation économique, sociale ou financière dans laquelle aucune réponse stratégique n’est efficace, et où les modèles connus sont incapables d’expliquer ou de prédire ce qui survient, le vide stratégique est le produit d’une lente construction qui, depuis la Guerre froide, a remplacé l’art de la stratégie par celui de la seule tactique.

Alors que la stratégie est originellement ce qui définit l’état futur souhaité, la tactique est une réaction et une mise en oeuvre de moyens pour transformer un état actuel. Or, petit à petit, la notion de stratégie s’est vidée de sa substance pour laisser place au paradigme du tactique. Conséquence d’une information surabondante, d’un culte exagéré du calcul, de la dictature de l’immédiat, le vide stratégique caractérise notre époque actuelle et crée des situations où les modèles, comme les idéologies, se révèlent incapables d’expliquer, de comprendre et de prédire ce qui survient.

Pour sortir de ce vide, il faut se défaire de la vision technicienne de la stratégie devenue omniprésente dès 1945 et réintroduire la notion de transformation. Il est également devenu indispensable de se reposer la question du but et des valeurs portées par les sociétés et entreprises. A ce titre, le questionnement sur les implications engendrées par l’application d’outils est fondamental, notamment dans l’enseignement de la stratégie.

Les discussions qui ont suivi la présentation se sont portées sur la définition de la « bonne » stratégie d’une entreprise, qui est souvent la conséquence d’une dissidence constructive cultivée au plus haut niveau de la hiérarchie.